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Nous vous souhaitons la bienvenue sur notre blog !!!
Le concept vient du fait que même à l'autre bout de la planète, les deux pieds dans le sable ou sur le sommet d'une montagne, Montréal me manquait.
Le but ultime de ce blog est donc de créer un endroit virtuel où les internautes pourront partager leurs coups de coeur de Montréal
Émilia et moi-même attendons donc vos suggestions des bars, restaurants, boutiques, parcs, musées, artistes, etc. afin de faire découvrir Montréal dans toute sa diversité et sa splendeur !
Visitez nos différentes rubriques et n'hésitez pas à ajouter vos commentaires aux suggestions déjà présentes !
Marie-Christine et Émilia
Quittant le Plateau pour une urgence, je me retrouvai un midi à Rosemont. De cette lointaine contrée — où il m'a été donné de vivre d'étonnantes aventures — j'écrivis une carte postale à ma blonde, que je vous livre ici. Notez que je ne vous livre pas ma blonde, mais bien copie de la carte. Nuance.
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Le sel
Un repas du midi sans toi de plus, je suis allé rue Beaubien mordre une poutine. Fait rare. Parfois l'on se tanne de la Biche rôti aux girolles, nous les Plateauniques. Mon choix s'est posé sur Frites Que Voilà (le nom du resto est changé par respect pour les protagonistes). Tu sais cette succursale minuscule sur un coin de rue où l'on était jamais allé. Maintenant c'est fait. On y est allé, mais seulement la partie "moi" de nous deux.
Arrivé là-bas, je fus accroché du regard par une lettre «tapée» dans la porte, genre faillite ou encore «veuillez noter qu'en raison de la mort du proprio, nous ne servirons pas de viande froide pendant trois jours». Le sujet de l'affiche? «Nos frites sont même pas bonnes, on le sait, nos excuses, on va le dire à notre fournisseurs». Curiositée piquée, j'entre et je commande une poutine-soucisse-européenne à une serveuse à barbe-quand-même-jolie-de-loin (je dirais à 15 pieds +).
À mes côtés, deux (*?%$&?%$ de bonhommes genre promoteurs culturels avec un enfant de je dirais 7 ans, et de l'autre bord du resto, deux gars genre bums pas plus propres que nécessaire.
La serveuse se démène et puis à la radio passe le hit disco de l'heure «Danse sur la merde qui passe à la radio, tout le monde, tout le monde cherche quelque chose à faire, alors danse sur la merde qui passe à la radio. Danse!».
En voyant la serveuse servir les deux gars pouillons, je me demandai s'ils voyaient sa barbe, s'ils se disaient entre eux: «Elle a des spots de barbes». Les deux (*?%$&?%$ de culturels s'échangent, quant à eux, des propos plus profonds, genre «c'est dans l'objectivité des choses que tu trouves ta réponse, tsé». Et puis, je sais qu'ils ne penseraient pas du mal de cette nymphette poilue, car ils sont droits comme en fait foi l'aventure qui suite (suite, s'accorde avec aventure, je le sais maintenant qu'on m'a donné un Grévisse). Le petit gars joue avec passion aux legos et se parle vaguement seul de bombe à neutrons qui tomberait, de mises en garde et il agrémente le tout en pseudo-criant des cris de mort étouffés.
Alors le sel et le poivre étaient installés devant moi sur une pile de napkins, comme si c'était de l'aménagement qui se pouvait. J'ai donc tassé le tout, placé les serviettes hors de ma face et puis le sel est tombé sur le côté. "Y va y avoir une chicane" que je me dis en pensant à toi, mais soulagé pour une rare fois que tu ne sois pas là. Je regarde à gauche, à droite, en me disant que c'est peut être icitte que ça va pogner.
Bon mais finalement j'oublie ça, car sur le mur devant moi, les photos anciennes d'un petit couple en médaillons séparés, qui doivent dater de 1900, me dépriment profondément. De un, ils sont morts, les amoureux. De deux, la femme est belle, mais son mari est vachement déprimant. Mais il était peut-être beau dans la vraie vie et elle, laide.
Les deux crottés s'en vont et laissent un tip généreux sur la table. La serveuse vient alors se précipiter pour ramasser tout ça, avec les restes de frites pas bonnes anyway, des verres collants et puis l'argent du tip dans le repli d'une main qui tient déjà deux fourchettes. À mi-chemin, derrière moi en fait, elle échappe de la monnaie. Elle viendra bien rechercher le tout, je m'en fous.
C'est alors que le petit gars échappe un morceau de lego par terre, va le chercher et revient en brandissant tout à coup à son père un deux piasses. Et là s'amorce un échange à haute voix (mais sur fond de Danse sur la merde) de «c'est quoi cette affaire là?», «C'est à moi», «C'est l'argent de la serveuse?», «Non, je l'ai trouvé ce matin», «Niaise-moi pas, tu me l'aurais dit ce matin», etc. Bref, la chicane. Une vraie chicane de sel, qui naît d'un rien, d'un j'aurais-donc-dû-,-aussi.
Mais la finale, c'est l'abdication moralisto-moderne du père, un pur mourialais-de Rosemont, qui envoie au bambin:
«Ok. Je ne le saurai jamais. Mettons que je te fais confiance, mon gars, c'est toi qui sais. C'est toi qui va se coucher avec toi-même ce soir.»
«De quessé», réplique du regard l'enfant, interloqué par l'annonce de cette nouvelle punition qui veut que l'on se couche avec soi-même. «C'est toi, poursuit papa, qui va se coucher ce soir en sachant très bien ce qui s'est passé entre ton coeur et ta tête».
J'ai décidé d'écrire ce mot à ce moment-là. Je me suis dit: "je dois l'écrire et le conserver pour me toujours rappeler dans quel monde je vivais en deux-mille-six".
Et puis je regardais le jeune jouer du lego à neutrons. Il en lança un dernier par terre d'ailleurs, ce qui lui permit d'aller finir la job, pour empocher le tip tout entier de Mademoiselle Ours. Se resseyant, il regarda en direction de son père par en dessous, mais rassuré par l'objectivité des choses, il continua ses jeux de vilains.